Le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi s'est exprimé sur l'"agression des Croisés" contre la Libye, après le déclenchement d'une opération militaire occidentale dans ce pays, a annoncé samedi la télévision officielle libyenne
PARIS Le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi a menacé samedi d'attaquer des objectifs "civils et militaires" en Méditerranée et affirmé que les "dépôts d'armes" étaient ouverts pour défendre la Libye, après le lancement par l'Occident d'une opération militaire contre ses troupes.
Dans un enregistrement sonore diffusé par la télévision officielle libyenne, il a aussi a affirmé que la Méditerranée était devenue "un vrai champ de bataille" et jugé que les frappes aériennes et aux missiles étaient une "agression croisée injustifiée" contre laquelle "le peuple libyen va lutter".
La coalition internationale est passée à l'action samedi, bombardant par air et par mer des objectifs en Libye afin de stopper la répression sanglante de la révolte lancée il y a plus d'un mois contre le régime de Mouammar Kadhafi.
Après des semaines d'hésitations, un mandat de l'ONU et un appui arabe, une réunion extraordinaire à Paris entre l'Europe, les Etats-Unis, l'ONU et des pays arabes a abouti à cette intervention militaire souhaitée par l'opposition libyenne après les vains appels au départ de M. Kadhafi.
Après une première frappe aérienne française contre un véhicule des forces gouvernementales, les Etats-Unis et le Royaume-Uni ont lancé une vague d'environ 110 missiles de croisière Tomahawk, a annoncé l'amiral américain William Gortney lors d'un point presse au Pentagone.
Les missiles ont été envoyés depuis des navires et des sous-marins et ont touché "plus de 20 objectifs" parmi lesquels des systèmes de défense anti-aérienne et des noeuds de communication stratégiques, tous situés sur la côte, a précisé le militaire.
Un haut responsable libyen a qualifié cette opération d'"agression barbare", affirmant qu'elle avait visé des objectifs civils et militaires et fait de "nombreuses victimes" et de "graves dégâts matériels".
La TV libyenne affirme qu'un avion français a été abattu, Paris dément
La télévision officielle libyenne a affirmé samedi qu'un avion français avait été abattu par la défense antiaérienne libyenne dans la région de Tripoli, une information démentie par l'état-major de l'armée française.
"La défense antiaérienne a abattu un avion français dans le secteur de Njela, dans la région de Tripoli", a affirmé la chaîne sans autre précision.
"On dément, tous les avions qui sont sortis aujourd'hui sont rentrés", a déclaré à l'AFP le porte-parole de l'état-major des armées, le colonel Thierry Burkhard.
L'opération militaire internationale destinée à stopper la répression de la révolte contre le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi a été lancée samedi par une frappe aérienne française contre un véhicule des forces gouvernementales à 16H45 GMT dans un lieu indéterminé.
Il s'agissait du premier tir après le feu vert jeudi de l'ONU au recours à la force pour protéger la population civile dans le pays.
Les USA rentrent dans la danse
Les Etats-Unis ont frappé samedi des défenses anti-aériennes libyennes à l'aide de missiles de croisière Tomahawk pour faciliter la mise en oeuvre de la zone d'exclusion aérienne par les forces de la coalition, a déclaré un haut responsable militaire américain. "La plupart des premières frappes prévues sont sur la côte parce que c'est là que se trouvent les systèmes" de défense anti-aérienne, selon ce haut-responsable s'exprimant sous le couvert de l'anonymat.
Ces frappes doivent se dérouler essentiellement aux abords de Tripoli et de Misrata (environ 200 km à l'est de Tripoli), selon lui.
Deux destroyers américains, le Stout et le Barry, ainsi que trois sous-marins, le Providence, le Florida, et le Scranton, se trouvent actuellement en Méditerranée à proximité de la Libye et sont équipés de missiles de croisière Tomahawk.
Ces premières frappes avaient été annoncées quelques minutes plus tôt par des médias américains, alors que de fortes explosions étaient entendues à l'est de Tripoli.
Les Etats-Unis sont "en première ligne des opérations militaires de la coalition", a soutenu ce haut responsable militaire. Mais interrogé sur la participation américaine aux opérations aériennes, il n'a pas précisé si elle comportait des chasseurs et des bombardiers.
"Nous fournissons les capacités (militaires, ndlr) uniques dont disposent les Etats-Unis", a-t-il affirmé: "capacités de contrôle et de commandement du champ de bataille, logistique -on est très bons pour ça-, missiles de croisière, guerre électronique" (brouillage des radars et communications ennemies).
L'aviation française ouvre le feu
Des avions français survolent samedi la Libye pour empêcher des "attaques aériennes" des forces de Mouammar Kadhafi sur Benghazi et sont "prêts à intervenir contre des blindés", avait déclaré un peu plus tôt le président français Nicolas Sarkozy, à l'issue d'un sommet à Paris.
"En accord avec nos partenaires, nos forces aériennes s'opposeront à toute agression des avions du colonel Kadhafi contre la population de Benghazi. D'ores et déjà nos avions empêchent les attaques aériennes sur la ville", a déclaré le chef de l'Etat.
"D'ores et déjà d'autres avions, français, sont prêts à intervenir contre des blindés qui menaceraient des civils désarmés", a-t-il ajouté.
L'officier a ajouté que la France avait mobilisé dans la journée une vingtaine d'avions pour ses opérations en Libye: quatre Rafale de la base de Saint-Dizier (Haute-Marne) et un AWACS pour la surveillance aérienne, deux Rafale pour le renseignement. De plus, deux Mirage 2000-D de Nancy et deux Mirage 2000-5 de Dijon ont été mobilisés pour attaquer des objectifs militaires, avec deux Rafale en renfort. Par ailleurs, six avions-ravitailleurs C-135 ont été mobilisés.
Clinton : "les USA vont apporter des capacités à l'effort militaire"
Les Etats-Unis ont des "capacités uniques", c'est à dire des moyens militaires dont ne disposent pas leurs alliés, et ils vont les apporter à la coalition en Libye contre Mouammar Kadhafi, a déclaré samedi à Paris la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton.
"L'Amérique a des capacités uniques que nous allons mettre à contribution pour aider nos alliés européens, canadiens et nos partenaires (dans les efforts) aériens à mettre fin aux violences contre les civils, y compris en mettant en oeuvre une zone d'exclusion aérienne, a-t-elle déclaré à la presse.
Invitée à préciser cette implication, Mme Clinton a expliqué qu'il s'agissait de "détails opérationnels" devant demeurer confidentiels.
Elle a revanche souligné que le soutien américain aux opérations était "inébranlable".
"Le monde ne va pas rester spectateur alors que le meurtre d'innocents continue (...). Nous nous tenons auprès du peuple libyen et nos efforts pour les protéger ne faiblirons pas".
En conséquence, Washington soutiendra "une coalition internationale prenant toutes les mesures militaires pour faire appliquer la résolution 1973" adoptée par le Conseil de sécurité de l'ONU qui demande notamment la fin immédiate des attaques de Kadhafi contre sa population libyenne, a-t-elle assuré.
"Kadhafi continue de défier le monde, les attaques sur les civils continuent, tout retard supplémentaire mettrait encore davantage de civils en danger", a estimé Mme Clinton, qui s'exprimait à l'issue du sommet international sur la Libye à Paris.
La France a engagé samedi une vingtaine d'avions militaires au-dessus de la Libye, prémices d'une opération militaire internationale plus large, et ouvert le feu contre un véhicule des forces de Mouammar Kadhafi.
Alors que la nature de la participation américaine à ces opérations demeurait floue samedi, Mme Clinton a insisté: "Nous n'avons pas pris la tête de ceci, nous ne sommes pas lancés dans une action unilatérale, en aucune manière".
"Mais", a-t-elle insisté, "nous soutenons fermement les actions entreprises par la communauté internationale contre les gouvernements et les dirigeants qui se comportent comme, hélas, Kadhafi le fait en ce moment".
Hillary Clinton a mis en avant l'adhésion des pays arabes à la résolution, un fait qui, selon elle, "a changé le paysage diplomatique". Mais cet effort, a-t-elle averti, doit aller au-delà de la participation au sommet de Paris: "Nous attendons plus", a-t-elle insisté.
Obama: "Notre coalition est prête à agir"
"Notre coalition est prête à agir" en Libye, a affirmé samedi le président des Etats-Unis Barack Obama, ajoutant que "le peuple libyen doit être protégé", lors de déclarations à la presse après une recontre avec son homologue brésilienne Dilma Rousseff à Brasilia.
"Le peuple libyen doit être protégé, et en l'absence d'une fin immédiate à la violence contre les civils, notre coalition est prête à agir, et à agir urgemment", a dit M. Obama.
A Paris, à l'issue d'un sommet extraordinaire entre pays occidentaux et arabes, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a souligné que les Etats-Unis allaient apporter des moyens militaires à la coalition en Libye contre Mouammar Kadhafi.
En Libye, des combats faisaient rage samedi à l'entrée de Benghazi, bastion des rebelles dans l'est de la Libye, le leader libyen Mouammar Kadhafi défiant la communauté internationale qui met en place une zone d'exclusion aérienne. L'opération a commencé avec un survol d'avions Rafale français.
Des centaines de Libyens au QG de Kadhafi
Des centaines de Libyens se sont rassemblés samedi au QG du dirigeant Mouammar Kadhafi à Tripoli "en prévision de frappes françaises", et les autorités libyennes ont emmené quelque 50 journalistes étrangers y faire un tour, a affirmé la télévision d'Etat. "Les foules se rassemblent autour des cibles désignées par la France" pour les bombarder, a ajouté la télévision, en diffusant d'images en direct de Libyens qui selon elle sont rassemblés à la résidence à Bab al-Aziziya ainsi qu'à l'aéroport international de Tripoli.
Un journaliste de l'AFP faisait partie d'un groupe d'une cinquantaine de journalistes étrangers emmenés dans une tournée à Bab al-Aziziya.
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