Quantcast
Channel: alterinfonet.org Agence de presse associative
Viewing all articles
Browse latest Browse all 70521

Les dettes de jeu

$
0
0
Les dettes de jeu
Si vous voulez jouer, empruntez de l’argent à un prêteur qui connaît votre goût pour le jeu : il ne pourra jamais vous demander le remboursement, comme le rappelle la Cour de cassation ce 4 novembre 2011 (Première Chambre civile, n° 10-24.007).

Je précise que, non-joueur invétéré, je dénonce au passage l’utilisation éhontée de la passion du jeu par l’Etat. Une escroquerie aussi légale qu’immorale.

Les faits se sont échelonnés sur deux ans : d’octobre 1995 à mai 1997, Accro avait signé chaque mois un acte dans lequel il reconnaissait avoir reçu une somme en espèces de Loser. Les reconnaissances de dette avaient pour motif le financement de ses besoins personnels et Accro s’engageait à rembourser au plus vite. En juillet 1997, les deux compères avaient établi un récapitulatif par une reconnaissance de dette générale pour  la somme de 11 500 000 francs outre intérêts.

Accro n’a rien réglé, et en novembre 2005, Loser a saisi le tribunal de grande instance. Les intérêts avaient fait des petits, et la somme réclamée était de 1 753 163,70 euros.

Mais Accro, pas d’accord pour payer, a soulevé l’irrecevabilité de la demande, en visant l’exception de jeu. Une « exception » est le moyen de droit qui vise à faire rejeter la demande comme non recevable. C’est fatal error.

L’exception en cause est contenue dans le très bref article 1965, resté inchangé depuis la promulgation du Code civil en 1804 : « La loi n'accorde aucune action pour une dette du jeu ou pour le paiement d'un pari ». Ce texte revient à dire que pour une dette de jeu, le paiement est purement volontaire. Toute la question est de savoir si, dans les relations entre le créancier et le débiteur, la somme peut être qualifiée de dette de jeu. MACAO-L-ENFER-DU-JEU.jpg

Dans la mesure où il y a des écrits, la cause de l’obligation au paiement d’Accro, énoncée dans cet acte, est présumée exacte. Mais c’est une présomption simple, et Accro garde deux possibilités pour se défendre : démontrer que Loser ne lui a pas versé la somme litigieuse ou que ce prêt lui a été consenti pour jouer. Dans la mesure où il s’agit d’un fait, cette preuve est rapportée part tout moyen.

Le premier point est l’énormité de la somme globale prêtée – 11 millions de francs d’époque en deux ans – et tout en espèces, comme chez Ballamou. Euh, je m’égare… La somme est hors de proportion avec des besoins de vie courante, et l’établissement de ces reconnaissances de dette mensuelles sur une longue période n’a rien de courant non plus.

De plus, le dossier montre que Loser savait qu’Accro était un joueur. Loser contestait l’être également, mais l’une des attestations indiquait pourtant qu’il s’était adonné aux jeux d’argent, et qu’à l’époque des faits il rencontrait de grandes difficultés financières, ce qui laisse penser que cet argent prêté venait lui-même du jeu, de telle sorte que Loser ne peut sérieusement prétendre avoir ignoré qu’Accro était joueur et que les sommes litigieuses étaient destinées au jeu.

Bref, les belles reconnaissances de dette ne valent pas grand-chose devant cette analyse des faits : il s’agissait de fonds destinés au jeu, ayant permis à Accro de payer ses dettes que de continuer à jouer.

Aussi, l’article 1965 s’applique : adieu au 1 753 163,70 euros. Joué,… perdu !

game_over.jpg



http://lesactualitesdudroit.20minutes-blogs.fr/


Alter Info l'Information Alternative

Viewing all articles
Browse latest Browse all 70521

Trending Articles