Une petite érection tardive du concept d’identité nationale. Ceux qui veulent devenir Français vont devoir signer une charte. Bien sûr c’est de la foutaise xénophobe, mais c’est aussi une destruction de l’idée de République.
Lisez cette salade : « Afin de s'assurer de votre bonne compréhension des droits et devoirs de tout citoyen français, et en particulier de la loyauté que chacun doit à la République française, il vous est demandé de prendre connaissance de la présente charte, puis, si vous y adhérez, de la signer. Votre signature, qui est la marque de votre engagement, est une condition indispensable d’obtention de la nationalité française ».
Eh bien, ça c’est nul, et antirépublicain. Que l’UMP fasse cela, et que le PS ne dise rien, c’est juste lamentable.
Chères amies étrangères et chers amis étrangers, si vous voulez la nationalité, signez, et basta. Signez vite, c’est une condition, désormais imposée par la loi, pour acquérir la nationalité. C’est comme payer un timbre fiscal, ou une case à cocher. Surtout, ne vous privez pas : signez.
Premier point de l’aberration : signer cette charte est un sésame administratif, mais cela n’a aucune portée juridique. Aucune. Et heureusement. Ils disent qu’ils veulent défendre la France, mais ils la détruisent.
La charte est conçue comme un document dont il faut respecter le contenu avec loyauté. C’est ça la fin de la République : la France devient un contrat. Avec l’UMPS, nous sombrons dans le subjectivisme. On passe un accord : la vie française n’existe que par le rattachement. Bientôt, on vous livrera le Journal Officiel à la maison, et vous signerez que vous êtes d'accord. Non. Je suis français et républicain parce que je suis un être humain libre et responsable vivant sur le sol français, et répondant aux conditions posées par la loi. A moi de trouver la distance. A moi d’être.
On poursuit avec la « loyauté ». Est-ce si simple de dire la loyauté à un Etat ? Qui peut dire ce qu’est cette loyauté à un Etat ? Respecter ses lois ? Certes, mais quid quand ces lois sont contraires au droit ? La France ne s’est-elle jamais égarée ? En 1940, qui est loyal ? Celui qui applaudit Pétain et dénonce son voisin, ou celui qui prend les armes contre le pouvoir et ses agents ? Qui est loyal quand le 8 mai 1945 l’armée française commet le massacre de Sétif ? Qui est loyal quand le gouvernement détruit les maisons de Roms pour soigner ses sondages ?
La République, c’est la vie des hommes fiers et libres. Personne n’a mieux représenté la République que les étrangers qui combattaient des troupes résistances des FTP-MOI contre les représentants de la France éternelle.
Cette charte est juste bonne pour la poubelle. Et ne nous trompez pas. Elle s’adresse aux étrangers voulant devenir français mais elle s’adresse à tous les Français, en voulant inculquer la culture de l’obéissance. Avec cette buse de charte, le Français n’est pas celui qui forge sa personnalité en se confrontant toutes les idées et en s’affrontant aux lois injustes pour faire progresser la société. Non ? Le Français de la charte est un gentil benêt qui signe les textes et s’engage à obéir.
Votre loyauté à la gomme, c’est la culture de la soumission.
L’arrestation de Zohra Drif, militante du FLN
Qui est loyal ?
Et allez, encore une bonne petite crapulerie anti-immigré, sanctionnée par le Conseil d’Etat (4 novembre 2011, n° 329829).
Le 14 juin 2007, c’est le mariage entre une Française et un Pakistanais, mariage non contesté par le parquet. De cette union, naissent deux enfants, de nationalité française.
L’épouse, restée en France pour le job, a rendu visite à son époux à trois reprises depuis le mariage, en 2006, 2007 et 2009, pour des durées de cinq à six mois chacune, et parmi bien d’autres preuves, les époux établissent l’existence relations téléphoniques durant les périodes séparant ces séjours.
Le 5 juin 2008, l'ambassadeur de France au Pakistan refuse de délivrer au mari un visa d'entrée et de long séjour, en qualité de conjoint de ressortissante française. Le mari saisit la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, qui confirme le refus. Motif : « le mariage avec une ressortissante française avait été conclu à des fins autres que l'union matrimoniale ».
Recours devant le Conseil d’Etat, qui rappelle les règles constantes du droit :
- Il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français dont le mariage n'a pas été contesté par l'autorité judiciaire le visa nécessaire afin que les époux puissent mener une vie familiale normale ;
- pour y faire obstacle, il appartient à l'administration, si elle allègue une fraude, d'établir que le mariage a été entaché d'une telle fraude de nature à justifier légalement le refus de visa.
Devant le Conseil d’Etat, fin 2011, le ministre soutient que le mariage aurait été arrangé par les familles et que les deux époux ont fait des déclarations contradictoires lors de leur convocation devant les services de l'ambassade de France au Pakistan.
N’importe quoi répond le Conseil d’Etat, rappelant la très simple réalité : un mariage non contesté, deux enfants français, des séjours longs de l’épouse au Pakistan et des relations téléphoniques régulières. Pour conclure par cette évidence : « rien ne permet de conclure que le mariage aurait été conclu à des fins étrangères à l'union matrimoniale ».
Aussi nulle que le ministre qui se prend une injonction de procéder à un réexamen du dossier dans un délai d'un mois. Et qui se prend une condamnation à verser 2 000 € au titre des frais de procédure engagés par les époux.
Le résultat des courses est que ce couple qui devait vivre ensemble depuis juin 2008 a du attendre plus de trois ans parce qu’il règne un air puant dans les bureaux où ça se décide. Honte à eux.
Vive l'amour, Niki de Saint Phalle
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