Voici un article intéressant du Monde. Nous précisons en gras les points les plus importants . Nous ajoutons également quelques commentaires suivis de la mention Ndlr.
Nicolas Baverez – La France et la zone euro se sont fracassées sur le mur de la dette. Avec des taux d’intérêt deux fois supérieurs à ceux de l’Allemagne, l’Hexagone a été dégradé par les marchés avant même la sanction des agences de notation. Elle aborde l’année 2012 avec la perspective d’une croissance nulle, d’un déficit commercial record, d’un chômage frappant plus de 10 % de la population active, d’une dette publique dépassant le seuil de 90 % du produit intérieur brut (PIB) à partir duquel elle réduit l’emploi et l’activité. La chute de cette dernière et la hausse des taux (1 point génère 3 milliards d’euros de charges supplémentaires) imposeront vite un nouveau plan de rigueur.
Fondamentalement, le modèle social français n’est plus compatible avec l’évolution démographique, la chute de la croissance et la défiance des investisseurs. Quant à la classe politique, elle s’est révélée incapable de moderniser le pays avant qu’il ne perde sa souveraineté financière et budgétaire et ne soit placé sous la double tutelle des marchés et de l’Allemagne. Comme en 1983 et à l’image des pays du sud de l’Europe, la France va devoir choisir entre une réforme drastique de son modèle économique et social ou son départ de la zone euro.
Dans le même temps, l’Europe va droit à la récession, cumulant ralentissement mondial, plans d’austérité et effondrement du crédit. [Ce point est important car il va provoquer la chute de l'immobilier -déjà en cours- et constituera un énorme frein à l'investissement pour les entreprises. Ndlr] La crise de la zone euro ne cesse de s’étendre, contaminant l’Europe du Nord, le système bancaire et les financements d’entreprise. Elle change de dimension avec l’Italie, qui est à la tête de la quatrième dette mondiale et dont le défaut provoquerait une dépression globale. Or si l’Italie avec Mario Monti – comme l’Espagne avec Mariano Rajoy – dispose désormais d’un gouvernement légitime et apte à engager les indispensables réformes, elle ne peut se sauver seule face à une dette de 120 % du PIB refinancée à des taux d’intérêt autour de 7 %. [Nous sommes à 8 ce matin. Ndlr]
La situation critique de la France et de l’Europe est en partie paradoxale au regard des atouts qu’elles peuvent mobiliser. Elle ne résulte pas d’excès spéculatifs des marchés, mais de l’impuissance du politique et du manque de leadership. Ainsi, la France a dilapidé toutes ses chances de se réformer à froid, poursuivant l’euthanasie de son appareil de production et la constitution d’une vaste bulle spéculative autour de sa fonction publique et de son Etat-providence. La zone euro, elle, fut construite autour de principes insoutenables : absence de gouvernement économique et de prêteur en dernier ressort, refus de la solidarité financière et de la responsabilité budgétaire, fédéralisme monétaire et renationalisation des politiques économiques.
La France n’a plus les moyens de sauver l’euro mais peut faire imploser l’Union monétaire si elle ne parvient pas à se redresser. Elle a trois priorités. Reconstituer une offre compétitive via la baisse du coût du travail, l’encouragement à l’épargne, l’orientation vers les entreprises, l’innovation. Reprendre le contrôle des finances publiques – cela implique un plan de 120 milliards d’euros d’économies à l’horizon 2016 reposant sur 80% de baisse des dépenses et 20 % de hausse d’impôts et de privatisations. Lutter contre le chômage de masse et l’exclusion.
L’oeuvre de soixante années d’intégration européenne est menacée par l’éclatement de la zone euro. Or le Fonds de stabilité (FESF), mort-né avec la dégradation de fait de la note de la France, ne dispose pas de la taille suffisante pour réassurer la dette italienne. Quant à la mutualisation des dettes par la création d’euro-obligations, elle exige des conditions juridiques et politiques – notamment la révision des traités -, dont les délais sont incompatibles avec l’accélération de la crise.
La spirale de déstabilisation des déficits publics et des bilans bancaires ne peut être cassée que par l’intervention de la Banque centrale européenne (BCE) pour monétiser les dettes souveraines, au-delà des 200 milliards d’euros de titres actuellement détenus.
L’Allemagne, qui porte la responsabilité première des conflits mondiaux ayant provoqué le suicide de l’Europe au XXe siècle, ne peut prendre le risque de ruiner l’euro et de provoquer une catastrophe économique planétaire. [L'auteur n'apporte pas ici l'éclairage qui permet d'anticiper la sortie de l'Allemagne car il convient de s'intéresser au parcours de Mme Merkel pour comprendre le jeu véritable qu'elle joue. Ndlr] Elle concentre les moyens de la puissance en Europe mais refuse d’en assumer la charge, qui implique la prise en compte d’un bien commun au-delà de ses intérêts. Réformes structurelles et encadrement des budgets des pays déficitaires seront vains sans la mue de la BCE en prêteur de dernier ressort. Pour sauver l’Europe, Paris doit renoncer à la croissance à crédit et Berlin aux chimères d’un monétarisme anachronique. (Source: Le Monde)
Liesi
Alter Info
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