L’accord d’association liant l’Algérie à l’Union européenne n’a pas débouché sur ce à quoi aspirent les chefs d’entreprise, parce que les opérateurs n’ont pas été associés aux négociations. Ils ont été informés de la date de sa signature, de celle de sa mise en œuvre, relève Reda Hamiani, président du Forum des chefs d’entreprise (FCE), au cours d’une conférence-débat organisée hier par la commission des affaires économiques de l’APN et consacrée à l’impact de cet accord sur l’économie nationale. Pour Hamiani, notre économie n’a pas été préparée aux conséquences auxquelles a donné naissance l’accord en question. Pas plus qu’elle n’a pas su tirer profit de l’aide allouée par l’Union européenne à la mise à niveau, fût-elle maigre. Explication : le président du FCE rapporte que l’Algérie n’a eu droit qu’à 60 millions d’euros pour la mise à niveau. Le Portugal a bénéficié de deux milliards de dollars, la Tunisie de 2,5 milliards de dollars. Et puis cet accord n’a rien apporté en termes d’IDE, alors qu’il était question que l’Union européenne nous aide à mettre à niveau notre tissu industriel et à attirer des investissements productifs. Il n’en est rien. La situation a empiré puisque l’accord nous a fait perdre d’importantes recettes douanières (plus de deux milliards de dollars) et inonder le marché de produits importés, mettant à mal et la production nationale et les entreprises. Ceux qui ont négocié cet accord ont commencé - je ne sais pas
pour quelle raison, ils l’ont fait - à démanteler nos barrières douanières avant la signature de l’accord, voire avant la fin des négociations, se souvient Hamiani. La situation étant ce qu’elle est, l’Algérie peut cependant revoir certaines dispositions de cet accord, car on ne peut pas jeter le bébé avec l’eau du bain ; mettre de côté l’accord avec l’UE, cela n’a pas de sens. Le démantèlement tarifaire a focalisé en fait le débat. Pour Youcef Benabdellah, universitaire et expert, il est des pays membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) qui protègent leur économie. Et ils le font bien. L’Inde, un pays avancé au plan politique et économique, dispose de 50 000 positions tarifaires au-dessus de 25% ; l’Algérie en est à 30%, c’est incompréhensible, estime-t-il. Youcef Benabdellah recommande que notre pays s’inscrive dans une nouvelle dynamique, dans le nouveau contexte, relevant qu’il y a soixante ans, les matières premières comptaient pour 50% dans le commerce mondial, actuellement elles constituent 10 à 15% seulement, ce sont les produits manufacturiers qui dominent le commerce. D’après cet expert, l’industrialisation publique n’est pas accompagnée en Algérie par une industrialisation privée, estimant que le secteur privé est encore jeune ; il est patrimonialiste et n’arrive pas à sortir du giron familial. Le privé a été cependant «réprimé» par l’Etat, selon Youcef Benabdellah. Louisa Hanoune, secrétaire générale du PT, n’adhère pas au raisonnement développé par cet expert, relevant que la mondialisation est en crise et que les pays de l’UE veulent bien que l’Algérie accède à l’OMC, mais pas dans les conditions qu’Alger souhaite. L’UE veut voir une Algérie à genoux adhérer à cette Organisation, parce qu’à ce moment-là, les 144 pays membres en tireront profit. «Vous en souvenez, les 27 étaient les premiers à critiquer la loi de finances complémentaire de 2009. Aujourd’hui, l’Europe est en crise et Merkel a perdu les élections à cause du plan d’austérité qu’elle a imposé, et non pas en raison du nucléaire», a-t-elle relevé. C’est une Europe en position de faiblesse, a ajouté Louisa Hanoune.
Youcef Salami
Alter Info
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