L'heure n'est plus à la guerre. Prévisible ce passage du tout-militaire au tout-diplomatique dans la Jamahiriya libyenne. En retirant ses missiles et ses avions de chasse et en confiant la gestion de l'embargo aérien au commandement de l'Otan, l'administration Obama avait visé juste.
La solution militaire n'est pas la bonne, le risque d'enlisement est trop grand. De toute façon, nul ne veut d'un débarquement de troupes au sol.
Les récentes manifestations en Irak contre l'occupation étrangère sont assez spectaculaires pour décourager les plus fervents supporters de l'aventurisme militaire. Tout comme feu Saddam, le colonel Kadhafi a promis une guerre longue durant laquelle les «croisés» laisseront des treillis en sang.
Parce que le secrétaire général de l'Otan, Andres fogh Rasmussen, craint un tel scénario du pire qu'il a choisi de mettre un terme à la polémique naissante entre les USA et les Vingt-huit de l'Alliance à propos du danger d'enfoncement dans les sables de Libye. Pis.
En plus du fait de déclarer que la solution ne peut être que politique -le Conseil national libyen a vu le vent tourner en sa défaveur après la baisse importante des frappes aériennes de la coalition-, l'Alliance atlantique Nord a précisé les réelles intentions pour lesquelles elle s'était sentie forcée d'intervenir en Libye.
Les coalisés n'ont aucune autre mission que celle qui consiste à protéger les civils et leurs intérêts dans la mesure du possible. En clair, ils n'occupent pas le ciel libyen avec l'objectif de renverser Kadhafi.
Loin d'eux l'idée de frapper la forteresse d'Al Azizia ou de capturer Mouammar Kadhafi vif ou mort. Doit être grande la désillusion dans les rangs de l'opposition après qu'un général US ait prédit qu'elle n'a pas les capacités requises pour marcher sur Tripoli.
Moins encore à déloger la tête du régime. Les opposants auront beau peindre les toits de leurs pick-up en rose pour ne pas être confondus avec les bataillons de Kadhafi, l'alliance internationale déclare ne plus être en mesure d'assurer l'avancée des troupes anti-régime.
Ni d'ailleurs les armer, les services du renseignement occidentaux ne finissent pas de fouiner dans le passé des membres d'une opposition qui n'inspirerait pas confiance en sa totalité.
Ajoutant à cela, le péril djihadiste qui profiterait du chaos libyen pour s'affirmer en tant que force déstabilisatrice tout au long du Sahel. Le schéma de cette double menace s'appliquerait-il au Yémen où le président Saleh passe son temps à évoquer un transfert de pouvoir en mains sûres ? Pas vraiment.
D'après The Washington Post, l'action de contingents militaires spécialisés dans la seule lutte contre Al Qaïda locale a été détournée de sa vocation initiale du fait que le président Saleh ait jugé plus important de combattre la rébellion chiite au Nord.
Gel ou pas des aides US, il continue de s'accrocher au pouvoir, Mouammar Kadhafi ayant insufflé de la ténacité jusqu'en Côte d'ivoire où le sortant Laurent Gbagbo a appelé ses partisans à résister contre la France.
A présent que l'opposition libyenne s'est forgée une idée précise sur l'Otan, devrait-elle, en conséquence, accepter de fait que les Kadhafi pilotent la transition politique d'autant que ni le plan de paix turc ni celui de l'Union africaine ne font explicitement référence à la nécessité de départ des Kadhafi père et fils ? Malgré la bonne volonté des uns et des autres, l'impasse diplomatique serait-elle à ce point incontournable,
le Conseil national libyen ayant déjà fait savoir qu'il ne se penchera pas sur une quelconque feuille de route qui ne mentionnera pas noir sur blanc, le départ du locataire du palais d'El Azizia ?
S'il est en train de gagner sur le plan militaire, il se pourrait que le volet diplomatique soit un peu plus compliqué à gérer. Il le serait beaucoup moins si les derniers «adeptes» de la solution politique rejoignent les premiers à avoir tablé sur cette option. Ce serait la grande victoire du front anti-guerre.
Par Anis Djaad
Alter Info
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