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Face aux mutations mondiales, la promesse de Jean Pierre RAFFARIN

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ALGERIE FRANCE
Face aux mutations mondiales, la promesse de Jean Pierre RAFFARIN
La presse algérienne s’est fait l’écho récemment  lors de la visite du premier ministre  Jean  Pierre  RAFFAFIN les 01/02 février 2012  d’une usine  de voitures en Algérie d’une capacité  entre 50.000  et  75.000  voitures par an . Comment ne pas rappeler les déclarations fracassantes des officiels à la télévision publique ENTV qui en cinq    années nous ont annoncé  successivement une voiture à 100% algérienne   italienne,  puis une voiture  iranienne, puis une  voiture  chinoise,  puis une voiture allemande, puis  une voiture sud coréenne   et maintenant on  annonce  une voiture  de montage  française. Hélas les contraintes internationales sont là et face aux mutations mondiales  se pose cette question stratégique : quel  sera  le seuil de rentabilité  d’une usine de voitures algérienne et  sera t –elle  concurrentielle au sein d ‘une économie ouverte  et d’un marché mondial oligopolistique  ? C’est l’objet de cette modeste contribution où je remercie mon ami Gilles BONAFI , expert financier  à Paris, de l’aide apportée.
 
I.- UN MARCHE MONDIAL OLIGOPLISTIQUE DE PRODUCTION DE VOITURES
 
1.- Le  constat , bien que la situation est évolutive, est que le marché de voitures est un marché oligopolistique , fonction du pouvoir d’achat ,  des infrastructures et de la possibilité de substitution  d’autres modes de transport notamment le collectif spécifique à chaque pays selon sa politique de transport, ayant connu depuis  la crise d’octobre 2008 d’importants bouleversements , les fusions succédant aux rachats et aux prises de participation diverses  et à  l’heure actuelle, les plus grandes multinationales sont General Motors et qui a été en  novembre 2010  recoté en bourse après s’être retirée pour une profonde restructuration, Volkswagen  et Nissan, qui depuis son alliance avec le constructeur français Renault,  Chrysler, FIAT , Honda, Mitsubishi et Mazda et que les  six premiers constructeurs mondiaux qui, tous, ont une capacité de production  supérieure à quatre millions de véhicules, représentent 61 pour  cent  du marché mondial de l’automobile, suivi  des  sociétés sud coréennes Hyundai, Daewoo, Kia, Ssang Young et Samsung ont rejoint les rangs des constructeurs indépendants, capables de financer, de concevoir et de produire leurs propres véhicules et que les   sociétés européennes multinationales sont les plus importants fabricants de pièces détachées et les plus grands constructeurs de camions, parmi lesquels Mercedes-Benz et Volvo.  Dans le reste du monde, la plupart des constructeurs automobiles sont des filiales de constructeurs américains, japonais et européens. Dans des pays comme la Malaisie, la Chine et l’Inde, la production sont gérées par des sociétés locales, mais toujours avec l’appui de grands groupes étrangers.
 
2. Nous observons deux tendances opposées qui sont en train de se produire en même temps: la localisation de la production sur certaines zones géographiques et sur certains pays et la délocalisation ; et  pour ce qui est de la localisation de la production automobile mondiale, elle   se concentre régionalement sur trois zones: l’Europe, l’Amérique du Nord et l’Asie. De plus, sur chacune d’entre elles la fabrication est localisée sur certains pays; ainsi, en Europe, les principaux fabricants sont l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni et l’Italie, appartenant tous à l’Union Européenne. En Amérique du Nord, la production se concentre majoritairement sur les États- Unis, et en Asie elle se trouve au Japon et en Corée du Sud et que pour les  exportations mondiales d’automobiles, la concentration est encore plus élevée, puisqu’elle est limitée principalement à deux zones: l’Europe et l’Asie. Et que dans  un futur proche avec la perte de compétitivité de certains pays au profit de certains pays émergents (Russie ,Inde, Chine, Brésil) nous devrions  assister à  la réorganisation de la production mondiale de véhicules en rapport avec les niveaux de formation des effectifs des usines et avec la recherche que réalisent les entreprises automobiles et en toute évidence, les usines qui se maintiendront sur chaque pays seront les plus compétitives, les  priorités des dirigeants des constructeurs automobiles étant  donc : technologie et innovation,(robotisation,)surtout au Japon dont le coût de la main d’œuvre est  dix fois environ supérieur à celui de la Chine, approche collaborative, meilleures stratégies de succès et  environnement.
 
3.- Le nombre de voiture en circulation sur la planète a atteint environ  1 milliard  en 2010, contre 900 millions d’unités en 2007 , les   experts du Fond Monétaire International (FMI) prévoyant  un parc mondial  de 2,9 milliards de voitures particulières à l'horizon 2050, cette vision partant de l’hypothèse d’une élévation  du revenu des ménages surtout des pays émergents  la population  comme la Russie, l'Inde ou la Chine représentant  des marchés à fort potentiel pour l'industrie automobile devant assister à une renversement de tendance  des ratios actuels où  on dénombre 600 voitures pour 1 000 habitants pour l’union européenne , cette proportion étant  de 200 pour 1000 en Russie et de seulement 27 pour 1000 en Chine, et qu’au sein du  parc automobile mondial ,  près de 70% seraient dus aux pays actuellement peu motorisés comme la Chine ou l'Inde.  Toujours selon cette étude, le continent asiatique (Japon, Chine, Inde essentiellement) devrait représenter 23% de la production mondiale automobile à l'échéance de 2011 pour une production annuelle  approchant 80 millions d’unités contre 72 millions  moyenne 2007/2008  et  42 millions d’unités en 2002.  Les  usines nippones, connues pour leur qualité et leur flexibilité, stimulées en outre par une forte demande étrangère, aurait produit en moyenne 2007/2008  un total de 10,7 millions de véhicules contre  10,5 millions de véhicules aux  USA se concentrant sur un segment clef   l'importance aux designs  grâce  aux grands  de bureaux de styles spécialisés.
 
4. Nous assisterons entre 2012/2020 à des   perspectives  technologiques futures tenant compte du nouveau défi écologique, (voitures hybrides, électriques ) et  du nouveau modèle de consommation  énergétique qui se met lentement en place , la crise d’octobre 2008 préfigurant d’importants bouleversements géo stratégiques et économiques, la Chine  étant  en passe  de devenir  le leader mondial des voitures propres toutes catégories   profitant  ainsi au premier chef des plans de relance "verts" des Etats-Unis, de l'Europe et du Japon.. Les experts avancent deux scénarios. Le premier scénario est  l’optimalisation  du fonctionnement des moteurs à essence et diesel, avec une réduction de 20/30% horizon 2015, de la consommation, car pour ce scénario   ,  les ressources en lithium pour les fameuses batteries lithium-ion sont limitées et que les moteurs électriques nécessitent des aimants que l’on fabrique aussi avec des métaux rares, un marché de 70/80 millions de véhicules par an ne pouvant  absorber de gros volumes en voitures   électriques et  que pendant encore dix  ans, les moteurs hybrides  et classiques devraient rester majoritaires. Le second scénario   ne partage pas   ce point de vue, les nano-technologies( la recherche dans l’infiniment petit)  pouvant révolutionner le stockage de l’énergie devant explorer parallèlement  le flex fuel et de penser à l’hydrogène l’avenir appartenant au  moteur alimenté par de l’hydrogène gazeux ou au solaire ce qui révolutionnera tous les  réseaux de distribution . Quel est donc  l’avenir  de notre planète  où  selon certains analystes, la taille du marché automobile chinois, sans parler de l’Inde, si l’on reste dans l’actuel modèle de consommation,  devrait être multipliée par dix  horizon 2030  se traduisant  par une hausse vertigineuse de dégagement de CO2, alors que la Chine a déjà dépassé les USA comme principal pays producteur de gaz à effet de serre?
 
II- LE MARCHE ALGERIEN DE VOITURES, FONCTION DU POUVOIR D’ACHAT

 
1. Il ya lieu  de tenir   compte   que la majorité  de la société algérienne est irriguée par  la rente des  hydrocarbures (plus de 75% des recettes fiscales )  dont l’évolution  des cours  déterminent fondamentalement  le pouvoir d’achat des Algériens et que depuis  fin 2006, l’inflation est de retour avec  la détérioration du pouvoir d’achat. Le revenu global  d’augmentation de 41% entre 2005/2011 annoncé par le Ministère du travail doit être corrigé   devant tenir compte  de la répartition  du revenu  et du modèle de consommation  par couches sociales, un agrégat global ayant peu de significations. Se pose cette question : le gouvernement algérien  ne sera t –il pas contraint d’avoir au recours à nouveau au crédit à la consommation du fait de la détérioration du pouvoir d’achat des ménages ?  C’est que plus de 70% de la population active algérienne touche un revenu moyen inférieur  à 30.000 dinars, certes devant être  corrigé  par la crise du logement  et les transferts sociaux via la rente  qui permettent   un regroupement des revenus. Qu’en sera-t-il avec l’épuisement inéluctable  des hydrocarbures en termes de rentabilité économique et non de découvertes physiques ? Dans ce cas  par rapport au pouvoir d’achat réel  en baisse   et surtout avec le nivellement par le bas des couches moyennes, que reste –il pour en termes de pouvoir d’achat réel pour   acheter une voiture ?
 
2.- Le deuxième  constat est que faute d’unités industrielles spécialisées, la plus grande part des pièces de rechange (parties et accessoires de véhicules automobiles) est importée Par ailleurs, malgré  les restrictions  des différentes lois de finances, montrant avec l’explosion de la facture d’importation entre 2010/2011 , les impacts mitigés du passage du Remdoc au Crédoc et  de la suppression du crédit à la consommation, entre  2009 à 2011 les importations de véhicules en Algérie, concessionnaires et particuliers, ont enregistré une hausse de 23,57%, au cours des neuf premiers mois de 2011, par rapport à la même période de l’année 2010 selon  le  Centre national de l’informatique et des statistiques ( Cnis ). Du 1er janvier au 30 septembre 2011, l’Algérie a importé près de 300 000 véhicules pour un montant de plus de 261,83 milliards DA ( mds DA ), contre 242 000 véhicules ( 228,2 mds DA ), durant la même période de l’année 2010, contre 2,7 milliards  de dollars en 2006 et 3 milliards de dollars en 2007 ,  selon  Cnis. dont  les particuliers 18 144 véhicules, durant les neuf premiers mois  , de l’année courante, contre 15 293 unités pour la même période de 2010, soit une hausse de 18,64%, pour, respectivement, 23,95 milliards de DA et 21,21 milliards de dinars e t pour les concessionnaire une hausse de 23,91%, soit 280 897 unités importées , contre 226 699 unités en 2010 (pour la même période), pour un montant de plus de 237, 88 milliards de DA en 2011, contre 206,98 milliards de DA en 2010, selon les statistiques du Cnis. Clôturé à fin 2011, 320 000 véhicules sont entrés sur le marché  l'Établissement national de contrôle technique automobile (Enacta).
 
3. Troisième constat,  au   01 janvier 2010,  le parc national automobile a atteint 4.171.827 véhicules, selon les chiffres de l’Office national des statistiques (ONS)  ce qui correspond à une hausse en véhicules neufs de 185.821 unités. La même source fait également état de 987.193 immatriculations et réimmatriculations durant la même année. Parmi les nouvelles immatriculations, les véhicules de tourisme représentent 79,46% soit 147.658 unités, suivis des camionnettes avec 33.968 unités. Par catégorie d’âge, la part des véhicules de moins de cinq ans d’âge représente 22,36% de l’ensemble du parc. On note ici un rajeunissement permanent du parc automobile durant les 5 dernières années. En effet, la proportion des moins de 5 ans n’était que de 6,1% en 2003, avant de passer à 21,89% en 2008. Ce rajeunissement s’est accompagné par un léger recul des véhicules de plus de 20 ans qui représentent 57,42% en 2009, contre 58% en 2008, 59% en 2006. C’est donc,   le deuxième parc  le plus important d’Afrique après l’Afrique du Sud  et le  premier rang des pays maghrébins
 
III-  QUELLE EST LA  FAISABILITE DU PROJET  D’UNE  USINE DE VOITURES ?
 
1.-Quel est donc le seuil de rentabilité pour avoir  un cout compétitif par rapport aux normes internationales, aux nouvelles mutations  de cette filière,( à titre d’exemple  Mitsubishi  a produit  794 681 voitures en 2009)  aux impacts  de la crise d’octobre 2009,qui n’est pas encore terminée étant de longue durée,  imposant d’importantes restructurations allant vers plus de concentration,   telle est la question stratégique  pour tout projet fiable à moyen et long terme et produirait entre 50.000 et   75.000 voitures  en misant uniquement sur  le marché intérieur algérien    permettra –il  donc d’être compétitif  d’autant plus que tous les  inputs seront presque importés . L’on  deva inclure le cout de transport, devant également la formation adaptée  aux nouvelles technologies et  les  couts salariaux  par rapport aux pays concurrents  et donc   la productivité du travail  qui selon l’OCDE est une des plus faible au niveau du bassin méditerranéen. Par ailleurs, les normes internationales, du seuil  des capacités  se situe entre 250.000 et 400.000 voitures an minimum, évolutives avec les grandes concentrations depuis 2009 devant certainement dépasser la  barre de 500.000  entre 2013/2015.
 
2.-Le  coût  est fonction  certes des gammes de voitures, surtout des capacités de production,   et la vente fonction  de la structuration des revenus  et  du modèle de consommation par couches sociales : pour l’Algérie en février 2012 l’on pourrait avoir cette structuration : voiture  de moins de 500.000 dinars TTC pour les  bas revenus, de 700.000/1.000.000 dinars pour les revenus moyens et au delà de 2.000.000 dinars pour les  revenus élevés. A  titre d’exemple Honda a pour 2009/2010 réalisé   un investissement de 630 millions de dollars (429 millions d’euros)  pour une production de 200.000 unités, employant 2000 travailleurs, par contre  Suzuki  1,7 milliard de dollars (0,86 milliard d’euros) pour 260.000 unités. Le  constructeur Renault-Nissan a projeté d’investir  600 millions d'euros près de Tanger, au nord du Maroc, pour créer une usine capable d'assembler 400 000 unités par an,( 170.000 prévues en 2012)  dont viendront  s'ajouter les investissements spécifiques aux véhicules qui seront assemblés dans ce site, qui seront compris entre 200 et 400 millions d'euros donc dépassant  le milliard d'euros ( plus de 1,3 milliard de dollars), projet rentrant dans le cadre  de l’internationalisation de cette firme,  destiné  pour une grande part à l’exportation. Cette usine  devrait employer  6 000 personnes directement  (en phase de croisière) et 30 000 emplois indirects avec des coûts de mains d'œuvre équivalents à ceux de la Roumanie, à savoir presque huit fois moins élevés qu'en France ,  des formations spécialisées de marocains étant prévus.
 
3.- Aussi, toute étude de marché sérieuse, si l’on veut le gaspillage des ressources financières,  évitons  la précipitation pour des raisons de prestige, l’Algérie étant une petite nation et soyons pragmatique, suppose que l’on réponde au moins  à ces quelques questions :
 
-Construit-on actuellement une usine de voitures pour un marché local alors que ‘l’objectif du management stratégique de toute entreprise n’est –il pas  ou régional, voir mondial afin de garantir la  rentabilité financière face à la concurrence internationale  et cette filière n’est –elle pas internationalisée   des sous segments s’imbriquant au niveau mondial
 
- La comptabilité analytique  distingue  les coûts fixes  des coûts  variables  A quels coûts  hors taxes ,  l’Algérie produira cette voiture   et en tendance  lorsque  le dégrèvement tarifaire allant vers zéro selon les Accord  qui la lie à l’Union européenne seront appliqués  et dans ce cas quelle est la valeur ajoutée interne créé par rapport au vecteur prix international  ( balance devises tenant compte des inputs importés et de l’amortissement  tous deux en devises) ? La carcasse  représentant  moins de 20/30% du coût total  c’est comme un ordinateur, le coût ce n’est  pas  la carcasse (vision mécanique du passé), les logiciels  représentant 70/80% et ne pouvant  interdire l’importation ,  la production locale sera-t-elle   concurrentielle  en termes du couple coûts/qualité dans le cadre de la logique des valeurs internationales ?
 
- C’est comme un  parfum ou un habit griffé, le consommateur achète également la marque : comment s’appellera la voiture algérienne ?   Et cette industrie  étant devenue capitalistique, quel est le nombre d’emplois directs et indirects  créés,   puisque qu’un certain nombre d’empois indirects restent  les mêmes (garages, magasins) et avons nous la qualification nécessaire tenant compte des nouvelles technologies appliquées à l’automobile. Ces  voitures  fonctionneront-ils à l’essence, au diesel, au GPL,  seront –elles hybrides ou au solaire ?  Quel  sera le prix de cession de ces carburants  et la stratégie des réseaux de distribution pour s’adapter à ces mutations  technologiques?
 
Docteur Abderrahmane MEBTOUL est Professeur d’Université, Expert International en management stratégique  Docteur d’Etat Economie (1974) et Expert comptable diplômé  de l’Institut supérieur de gestion de Lille (France 1973).
 
 

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