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Irak : l’impardonnable génocide culturel

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Irak : l’impardonnable génocide culturel
Depuis 1991, l'ancienne Mésopotamie, l’un des plus anciens berceaux de la Civilisation humaine, est dévastée avec un acharnement sans précédent : pillage des sites archéologiques et des musées, bombardement des édifices historiques, incendie de la Grande Bibliothèque et des Archives nationales, dégradation des pièces des musées causée par treize ans d'embargo.
 
Tout au long de l'occupation du pays, la destruction des cités antiques et médiévales et des sites archéologiques, par l'Alliance anglo-américaine, s’est poursuivie à une échelle jamais connue dans l'Histoire, même au temps des invasions mongoles.
De 2003 à 2010, et, encore, de nos jours, l'Occupant a transformé des villes antiques irakiennes en camps militaires, dont les engins enterrent les vestiges d'une très longue Histoire, dont le puzzle ne pourra plus jamais être reconstitué. A la mi-janvier 2009, le quotidien britannique, «The Guardian», a révélé un rapport alarmant du British Museum, sur l'état du site de Babylone. Comment ce patrimoine unique, qui appartient à l'Humanité entière, a-t-il pu être, ainsi, anéanti, dans l'indifférence générale ?
Dans son article, le quotidien écrit : "Les troupes américaines n'ont pas, seulement, négligé de protéger les sites historiques et les biens culturels, elles ont participé elles-mêmes à ces exactions. Elles ont bombardé la grande Université Moustansirya bâtie au XIIIe siècle et célèbre pour son horloge astronomique ; ces troupes ont transformé le site d'Ur en base militaire, creusant même des tranchées, dans le sol. Tout au long de l’offensive et pendant les huit ans qu’a duré l’occupation, les chars américains ont roulé à travers les vieilles rues de Babylone, quitte à écraser les maisons, les boutiques et les quartiers anciens, dont l'origine remonte, pour certains d’entre eux, à la préhistoire.
La campagne de bombardements intenses des agresseurs a détruit ou endommagé plusieurs musées, celui de Bagdad, bien sûr, mais aussi, plusieurs musées, en province. Et que dire de la bibliothèque nationale et des Archives d’Etats, dont le personnel s'efforce toujours et sans grand succès de sauver les documents rescapés du grand incendie de mars 2003, tout en travaillant, dans de très mauvaises conditions. A l’heure qu’il est, les archives ottomanes de la bibliothèque, qui retracent l'histoire du pays, du XVe au XXe siècle, sont en grand péril. Après avoir été arrosées d'eau, en 2009, elles commencent à moisir et ont dû être stockées, dans de grandes chambres froides souffrant des pannes d'électricité généralisées, à travers tout Irak.
En Irak, les palais et les édifices religieux ne sont pas restés, non plus, à l’abri des saccages er des pillages systématiques. Par le passé, Bagdad fascinait ses visiteurs, par ses multiples mosquées aux dômes recouverts de feuilles d'or et ses minarets décorés de mosaïques bleues, ses souks et ses habitations traditionnelles, aux bords de l'Euphrate. De cette splendeur d’antan, il ne reste plus aujourd’hui grande chose. En 2006, une célèbre photo, parue, dans un grand quotidien anglais, a suscité un grand émoi ; celle-ci montrait des soldats américains en train d'arracher des fragments de fresques des murs d'une mosquée, sous l’œil bienveillant de leurs supérieurs. Ces cas de pillages sont multiples, mais la ville sainte de Nadjaf constitue un exemple à part. La vieille cité, fondée, au VIIe siècle av. J.-C., qui fut la capitale de l'empire assyrien, est l'une des rares villes mésopotamiennes mentionnées dans la Bible. Après que ses maisons traditionnelles, ses mosquées, ses madrasas (écoles coraniques), ses marchés, ses catacombes et son cimetière sacré (l'un des plus grands du monde, où sont enterrés plus de deux millions de personnes), aient subi les assauts des chars et des missiles, la ville a été livrée aux bulldozers. En effet, le "gouvernement" de Iyad Alaoui, l’ancien Premier ministre importé dans les valises américaines, a décidé de terminer le "nettoyage" de la ville, pour mettre en œuvre l'un des premiers grands projets de "reconstruction" du pays qui profiteront aux compagnies américaines. La démolition du vieux quartier a commencé, dans un périmètre de 60 m autour du mausolée de l'Imam Ali, l'un des principaux sites du Chiisme. Ce qui n'a pas été détruit, par le feu, l'a été par les bulldozers des multinationales américaines.
Mais ce génocide culturel est-il permis ? Les articles de la Convention de la Haye de 1954 et la Convention de l'UNESCO de 1970 obligent les forces occupantes à protéger les biens culturels. C'est à l'inverse qu’on a assisté, en Irak: les agresseurs ont détruit le patrimoine culturel du pays avec la bénédiction des plus hauts responsables américains. Dans l'année qui a précédé l'invasion de 2003, les reportages sur l'Irak diffusés dans l'ensemble de la presse écrite et audiovisuelle occidentale tentaient de présenter un pays sous-développé, un peuple arriéré, et les souffrances insupportables d'une jeunesse désoeuvrée, privée d'Internet et d’autres avancées technologiques, par un tyran sadique, qui, rappelons-le, fut longtemps l’un des plus proches alliés de l’Occident.
Pas un mot sur l'Histoire du berceau mésopotamien de l'humanité, de sa richesse archéologique unique au monde, et du haut niveau d'éducation de sa population. C'est, seulement, lorsque l'on crût le pays "pacifié", que certains medias, à vocation dite culturelle, ont osé consacrer, de très rares émissions thématiques à la Mésopotamie et aux pillages de ses trésors.
L’Irak, qui recèle plus d'un demi-million de sites archéologiques, (dont la moitié, seulement, avait commencé d'être fouillée), est, en réalité, comme l'a souligné le Dr John Curtis, assyriologue du British Museum, «un seul immense site virtuel » : 90% de ses collines enferment les vestiges de villages antiques, des vases, des statuettes, des bijoux, des sceaux-cylindres sumériens, et des centaines de millions de tablettes cunéiformes, dont, seulement, moins d'un pour cent aurait été retrouvé à ce jour. La seule perte de ces tablettes, qui racontent la vie de «nos plus lointains ancêtres connus en ligne directe est à, elle seule, une catastrophe irréparable».
Les vrais auteurs des pillages des richesses culturelles d’Irak sont organisés par de puissantes organisations mafieuses, au service de collectionneurs cupides, de galeries, voire, de grands musées. C’est ainsi qu’on retrouve les pièces volées, à Genève, Londres, à Tokyo ou encore, à New York. Or, «un objet d'art qu'on a exhumé, sans faire le relevé de la strate géologique qui lui est associée, comme le rappelle John Curtis, devient un orphelin de la chronologie». «En outre, s'il est exposé, sans mention de provenance archéologique, il est privé du contexte économique, social, idéologique et historique, sans lequel, l'Art ancien reste inexplicable».
S'attaquer à leur culture, surtout, quand elle est aussi riche, est un moyen efficace d'humilier des peuples fiers de leur Histoire, comme le sont les Irakiens. Et quelle jouissance, pour les occupants, de contempler des membres de cette même population, réduite à la misère et aux maladies, et souvent à la rue (en raison des destructions systématiques des habitations, comme en Palestine), piller, avec honte, leur propre patrimoine, pour acheter quelques rares médicaments disponibles, pour soigner les leucémies, maladies graves, blessures ou amputations causées à leurs enfants, depuis 1991, par les armes à l'uranium appauvri, treize ans d'embargo et huit ans de guerre sans merci et des attentats qui n'en finissent pas. Tout se passe comme si l’invasion et l’occupation de l'Irak avait pour but de l'effacer, non seulement de la carte géographique, mais aussi de l'Histoire de l'Humanité, par tous les moyens.

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