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Libye: Benghazi, coeur de la révolution.

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Libye: Benghazi, coeur de la révolution.
L’intensité de la répression que subit le peuple libyen n’est lisible que par le caractère pathologique de leur dirigent - dictateur. Les premières images et les témoignages nous ont été rapportés par les jeunes devenus grâce aux nouveaux moyens de communication, des reporters qui brisent les frontières.

Les manifestations ont commencé le 15 février pour prendre une tournure plus importante à la date anniversaire du 17 février. En effet, selon ce qui m'a été rapporté par des libyens, à Benghazi, le 17 février 2006, les forces de sécurité ont tirés sur des jeunes faisant 18 morts. C’était l’année des caricatures montrant le prophète Mohammed (PSL) en terroriste sanguinaire. Le monde musulman s’en est ému et les habitants de Benghazi ont choisi de manifester au jour de sa naissance (Mawlid annabawi). Par un geste provocateur, le consul italien avait mis un T shit avec une des caricatures. Ce qui ne pouvait qu’augmenter la colère des manifestants. Quelques uns s’en sont pris au bâtiment consulaire et avaient fini par arracher le drapeau italien. Alors les forces de sécurité ont ripostés par des balles réelles, faisant 18 morts. Depuis, les habitants de Benghazi ont décidé de manifester tous les ans le 17 février. Et l’année 2011, boostée par l’environnement régionale se devait d’apporter autre chose !!
 

Quand j’ai pris l’avion le mardi 22 février, en direction d’Alexandrie en Egypte, Benghazi est déjà tombée dans les mains de la population révoltée. Le weekend  fut meurtrier pour les libyens et intenses pour nous autres qui essayons de suivre ce qui s’y passe malgré le blackout mis en place par le régime, qui envoi des mercenaires tirer sur son peuple.
 
Les médecins égyptiens se sont mobilisés et on a entendu parler de leurs caravanes médicales qui avaient des difficultés à passer, du moins au début, à cause de l’insécurité. Les équipes de l’ONG égyptienne : Union des Médecins Arabes étaient  les premiers à arriver dans les villes de l’Est libyen.  Non seulement, ils sont à proximité mais en plus ils ont une capacité rapide de mobilisation. J’ai eu à collaborer avec eux lors de l'agression sioniste sur Gaza et apprécier leur travail et leur dévouement.

Après plusieurs heures de voiture, on arrive en milieu d’après midi à la frontière. Il y avait une atmosphère surréaliste. Deux ou trois kilomètres de bus qui se tiennent les uns derrières les autres attendent l’autorisation de passer de l’autre côté de la frontière afin d’aller chercher les voyageurs qui fuient la Libye.

 
Tout le long de la route, il y avait des barrages de jeunes en armes, et d’autres faisant office de gardiens des lieux. Tous sont d’apparence inexpérimentée mais affichaient une fierté et une détermination qui n’a pas été démentis tout le long de mon périple et mes rencontres.
Un sentiment étrange envahi le voyageur que je suis, c’est celui de voir les signes  de la liberté se dessiner sur les visages. Un peuple se libère en quelques jours et se prends en charge aussi vite. Une fraternité émane de ces jeunes gens, qui se saluent, se congratulent, klaxonnent ou exhibent le V de la Victoire.
 
On est arrivé à la ville d’albaida, à mi chemin entre la frontière et Benghazi au moment du prêche du vendredi. Il pleuvait, l’imam a parlé, bien évidement,  des événements que traverse le pays. Il a exhorté les jeunes à ne pas attenter aux biens de la cité, ni à ceux d’autrui. Ce qui est prohibé par les valeurs de l’Islam. Défendu la légitimité de cette révolte face à l’injustice et prié pour ceux qui sont tombés pour que les vivant puissent avoir la tête haute.
 
Quand je suis arrivé à Benghazi, la ville était en fête, les voitures klaxonnent à tue tête. Les jeunes et moins jeunes arborent les couleurs de l’ancien drapeau noire, rouge et vert avec un croissant et une étoile. Signe de libération et recouvrement de soi face au drapeau vert uniforme et plat imposé par le guide vieillissant.
 
Nous avons été accueillis par des représentants de révolutionnaires qui ont investi les bureaux du port maritime. Non loin de là, la cellule médicale se tenait dans un centre de santé. Les responsables désignés, nous ont proposé la visite des hôpitaux.
Devant le tribunal, La place de rassemblement des manifestants a pris désormais le nom de ‘’ Tahrir ‘’en hommage au ‘’Maydan Tahrir’’, place de la libération du centre du Caire, qui est en passe de devenir un haut lieu symbolique de la contestation non seulement en Egypte mais dans tout le monde arabe. Eu égard à l’importance qu’occupe l’Egypte dans le monde arabe, et ce à tous les niveaux.
 
Les médecins de l’hôpital al jalaa de Benghazi, le trauma center avaient accueilli et managé les cas les plus périlleux. Les autres hôpitaux n’ont pas été en reste.  Le peuple révolté en est sorti vainqueur en quelques jours, au prix de centaines de morts et de blessés.
Dans les services de réanimation des services de l’hôpital al jalaa et de l’hôpital al hawari, j’ai vu des patients paraplégiques qui ont reçu des coups de feu dans la nuque et la tête. D’autres ont des coups de feu dans le dos provoquant des sections de la moelle épinière. Quand aux photos qui m’ont été montrés de patients coupés en deux par des missiles, ils sont tout simplement insupportables. Ces images ne laissent aucun doute sur la volonté délibérée des mercenaires à tuer et à terroriser la population.
Les jeunes gens remontés à bloc, se sont battus d’abord avec des moyens de bords et ensuite avec des armes récupérés aux forces de ‘’ l’ordre’’ et aux assaillants. Ils ont réussi à par les mettre en déroute et prendre la ville en quatre jours.
Les révolutionnaires de Benghazi se réfèrent non sans fierté à leur héros de lutte anticoloniale Omar al mokhtar, natif de Derna dans la montagne verte. Ses épopées contre l’armée coloniale italienne sont restées dans les annales non seulement des libyens mais dans tout  le monde musulman.
Les jeunes de Benghazi ont usé d’un courage insolite afin de venir à bout d’une milice qui leur tirait dessus par des missiles antiaériens. Les jeunes ont utilisés des bombes artisanales qu’ils avaient l’habitude de manier pour pécher (en prenant d’énormes risques). Le système Kadhafi qui a appauvri une population. La corruption du système a poussé quelques soldats à faire des trafiques des armes en vendaient des missiles. Les jeunes pécheurs récupèrent la TNT de ces missiles pour  fabriquer des bombes avec des boites de conserve. C’est comme cela qu’ils avaient de quoi se défendre au début des affrontements. L’un d’entre eux, a rempli sa voiture par ces bombes artisanales et des butanes de gaz et a foncé sur la porte de la garnison, faisant exploser cette dernière. Profitant de l’effet de surprise des mercenaires, des jeunes ont escalader les palmiers et ont lancés leurs bombes sur les mercenaires. Usant du même procédé que leurs grands parents (sommet des montagnes par rapport aux vallées) face à un adversaire qui possède des moyens supérieurs. D’autres qui avaient récupérés des armes des postes de polices, ont tiré aussi sur les mercenaires pris de panique. J’ai appris ces détails au décours d’une discussion avec les habitants et un grand père a ajouté : Nos enfants se battent pour une cause, ils n’avaient pas peur de la mort. Tandis que les mercenaires veulent vivre afin de pouvoir dépenser leurs soldes offertes par Kadhafi. C’est le secret de notre victoire !!
 
 
A Benghazi, j’ai trouvé une situation sanitaire qui s’est relativement calmée. Bien que personne ne peut prédire ce qui va se passer. Les malades opérés suivent des soins dans les différents services. Les secours en termes de médicaments et matériel médical afflux et seront utilisés au fur et à mesure des besoins futurs. Cependant, les villes sous le feu des combats ne sont pas accessibles pour le moment, ce qui complique le transfert des blessés vers les gros hôpitaux de benghazi. Le monde occidental envoi de l’aide à défaut de politique, fait des déclarations à défaut d’actes. Mais, il n'est plus le moment de faire quoi que se soit. La France, l'Angleterre et l'Italie ont fait de juteuses affaires avec Kadhafi en lui vendant les armes, que ses mercenaires utilisent actuellement. Depuis sa réhabilitation en 2004, suite à l'indemnisation des victimes de l'attentat de l'avion de l'UTA, Kadhafi est devenu fréquentable, selon la bonne logique des affaires et du marché.
 

 
A Benghazi, les libyens m’ont dit qu’ils ont retrouvé leurs âmes qui leurs ont été confisqués. Ils se sentent frères et sœurs, ils respirent enfin, un air pur, celui de la liberté retrouvée. Ils s’activent dans l’entraide et le partage. Devant l’esplanade du tribunal en face de la corniche haut lieu des rassemblements et des manifestations quotidiennes, les libyens scandent des slogans, discutent politique et distribuent la nourriture.
 
Les magasins sont encore fermés, à part les supérettes et les pharmacies, mais personne ne devrait manquer de rien selon les responsables de la ville. Une solidarité retrouvée, une fois que le paysage a été ‘’nettoyé’’ de la présence des agents des ligues populaires révolutionnaires de Kadhafi. Je n’ai pas pu m’empêcher de penser à toutes ses forces d’ (in)sécurité qui sévissent dans le monde arabe et qui ne sont que le reliquat du temps colonial. Leur rôle n’est autre que de terroriser la population et la racketter, au lieu de la servir et la protéger.
Dans toute la ville, il y avait des affichent qui insistent les jeunes à la civilité. D’autres qui  prohibent la tribalité et la division et qui rappellent que la libération ne sera complète qu’après la délivrance de Tripoli. On pouvait traverser la ville en long et en large, point d’agents d’ (in)sécurité et point de problèmes. Des jeunes gens ont pris en charge la circulation dans les ronds points.
 
Les habitants de Benghazi et les villes ''libérées'' ont pu franchir pour la première fois la forteresse où habitait Kadhafi jouxtant des garnisons et des prisons sous terre qui ont vu passer tant de prisonniers. Quand on y met les pieds, on est pris par un nœud à la gorge, il ne reste plus que des murs lézardés qui nous conterait bien les supplices et les tortures dont elles étaient les témoins. Un sentiment étrange de révolte et de tristesse envahit tous les visages qui sortent de cet endroit sinistre et instructif.
 
 L’accumulation de pressions conduit à l’explosion !! Les libyens jeunes et moins jeunes ont subit depuis des décennies une série d'injustices et il a fallut prendre les armes pour lutter contre leur dictateur étouffant. Les jeunes même inexpérimentés ont pris leur courage à deux mains et se font enrôler courageusement dans les unités révolutionnaires.

 
Tous les libyens que j’ai pu rencontrer sont confiants et certains de leurs victoire. D’ailleurs, ils m’ont dit qu’ils n’ont pas un autre choix. Si Kadhafi reprend la ville, il est capable de les tuer tous. Et de me répéter une autre phrase, prononcée par Omar Al mokhtar à l’adresse des colons italiens : « Nous sommes un peuple qui n’abdique pas, Nous gagnons ou Nous mourons ». 


Dr Zouhair LAHNA,
médecins sans frontières

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