Ce 6 avril, Juvénal Habyarimana rentre d’un vol de nuit depuis le Kenya, où il a reçu une forte pression de mettre en œuvre l’accord. Alors que le Falcon du président s’approche de la piste d’atterrissage, il est frappé par deux missiles, et les douze occupants décèdent. Aussitôt, les rebelles tutsis sont accusés, et c’est le début des massacres qui vont être un génocide : 800 000 morts.
Le juge Bruguière ayant quitté le service, deux juges d’instruction ont repris l’affaire, et sont vite tombés sur cette évidence : comment poursuivre une telle procédure, sans avoir vérifié les éléments matériels, et alors que cela est possible ? Les autorités de Kigali ont accepté la venue des juges et des experts – balisticiens, spécialistes de crash aérien, géomètres, acousticiens – qui ont pu travailler dans les meilleures conditions, et ont rendu leur rapport en fin de semaine. Ce rapport est une pièce de l’enquête, qui a été présentée à toutes les parties intéressées, et l’évidence des conclusions est telle que les avocats des parties opposées admettent l’essentiel du rapport.
Point déterminant : l’impact a eu lieu sous l’aile gauche de l’appareil, près du réservoir de kérosène, ce qui a déclenché l’incendie. Or, ce point ne pouvait être atteint depuis la colline de Masaka, contrôlée par le FPR. En revanche, il pouvait l'être depuis une base des troupes gouvernementales, le camp militaire de Kanombé.
De plus, plusieurs personnes présentes dans le camp ont entendu les diverses phases du tir, ce qui aurait été radicalement impossible si les missiles savaient été tirés depuis la colline, bien à l’écart.
Cela ne dit pas qui a tiré. L’enquête a mis en évidence la sophistication des missiles utilisés, ce qui accrédite la présence de mercenaires hautement entraînés pour ce geste criminel.
Les juges ont laissé un délai de trois mois pour recevoir des éléments critiques de ce rapport. Seize ans après les faits, il sera bien difficile de dire qui a commandité cet attentat, et qui l’a effectué. Mais la logique est aujourd’hui la mise hors de cause du président Paul Kagamé et de ses proches. La thèse des victimes du génocide qui en avaient été les déclencheurs… Tout çà sur la base d’une enquête aussi bâclée…
Mitterrand, Balladur et Juppé avaient soutenu jusqu’à l’aveuglement le régime génocidaire de Juvénal Habyarimana. Les forces françaises étaient omniprésents autour de l’armée gouvernementale. Ces dirigeants politiques, ces chefs militaires qui n’ont rien vu du génocide…
Je dois reconnaître à Sarkozy d’avoir été le premier à dénoncer l’aveuglement des dirigeants politiques français. Il avait su se rendre à Kigali, rencontrer Paul Kagamé et le peuple rwandais. Sarkozy avait dit que la France devait réfléchir à ses erreurs. Elle doit aussi ouvrir toutes les archives.
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